Dans une cité où les hommes libres se réunissent pour écouter et
décider, celui qui parle fait appel au jugement, et pour cela il doit toucher.
Parler c’est travailler avec l’ethos
et le désir puisqu’il faut répondre à cette nécessité : quel caractère
incarner pour mobiliser le désir de la communauté ?
Les grecs disposaient de deux
lieux pour exercer cette parole : l’agora
et le théâtre. Le théâtre, lieu où la communauté immobile et à distance va, là
aussi, se trouver devant un spectacle qui va la toucher, la déplacer et
organiser cette katharsis, cette
clarification de quelque chose d’obscur dont le discours sur l’agora semble ne pas devoir s’occuper. Au
contraire, il semblerait, à lire les textes grecs, que le théâtre ait eu une
fonction extrêmement importante de clarification des aspects de la communauté,
rendant d’autant plus opératoire la parole publique, pour que le politique et
la communauté fonctionnent.
Marie-José Mondzain, Le commerce des regards